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Les taux d’IPP ne se cumulent pas automatiquement : comment les assureurs calculent vraiment votre incapacité ?

Lorsqu’on traverse un accident du travail, une maladie professionnelle ou une invalidité de longue durée, une question revient sans cesse :

« Est-ce que mes différents taux d’incapacité se cumulent ? »

« Si j’ai déjà un taux d’IPP et qu’une nouvelle pathologie apparaît, est-ce que ça s’additionne ? »

La réponse peut être décevante pour les assurés : non, les taux d’IPP ne se cumulent pas automatiquement. Et pour complexifier le tout, les assureurs n’utilisent pas le taux d’invalidité de la Sécurité sociale pour déclencher leurs garanties. Ils appliquent leurs propres règles, leurs propres barèmes, et s’appuient sur des expertises médicales spécifiques.

L’objectif est de démêler tout ça, étape par étape, et de donner des repères concrets pour comprendre :

  • ce que signifie réellement un taux d’IPP,
  • pourquoi les taux ne s’additionnent pas comme de simples pourcentages,
  • comment les assureurs calculent leur propre taux d’invalidité,
  • dans quels cas une nouvelle pathologie peut faire augmenter votre taux,
  • et quels recours vous avez en cas de désaccord avec un assureur.

IPP, invalidité, assurance emprunteur : trois logiques différentes

Avant de parler de cumul, il faut comprendre de quoi on parle exactement. On mélange souvent trois notions :

L’IPP (Incapacité Permanente Partielle) de la CPAM

En matière d’accident du travail ou de maladie professionnelle, la Sécurité sociale attribue un taux d’IPP au moment de la consolidation.
Ce taux traduit : l’atteinte fonctionnelle (séquelles physiques, sensorielles, psychiques), et l’incidence professionnelle (impact sur la capacité à exercer le métier, reconversion, pénibilité accrue, etc.)

Ce taux peut ouvrir droit à :

  • une indemnité en capital (pour les “petits” taux),
  • ou une rente AT/MP pour les taux plus élevés.

L’invalidité « classique » de la CPAM

En parallèle, la CPAM peut vous classer en invalidité 1, 2 ou 3 (régime maladie) en fonction de votre capacité à travailler, avec souvent ce repère :

Catégorie 2 : invalidité grave avec incapacité à exercer une activité professionnelle, souvent présentée comme ≥ 66 % d’incapacité de gain.

⚠️ Important : Le taux d’invalidité CPAM et le taux d’IPP AT/MP sont deux mécanismes distincts. Ils ne se cumulent pas entre eux, et surtout, les assureurs n’y sont pas automatiquement liés.

Le taux d’invalidité de l’assurance emprunteur

L’assurance emprunteur (crédit immobilier, par exemple) fonctionne encore selon une logique propre :

  • elle ne reprend pas “bêtement” les taux de la CPAM,
  • elle applique son propre barème, inscrit dans les conditions générales,
  • elle s’appuie sur une expertise médicale réalisée par un médecin tiers, mandaté par l’assureur.

Pour ouvrir la garantie IPT (Invalidité Permanente Totale), la plupart des contrats exigent un taux d’invalidité d’au moins 66 %, calculé selon le barème interne du contrat, et non selon la CPAM.

lire également : https://www.adppc.fr/subrogation [définition ]

Pourquoi les taux d’IPP ne se cumulent pas automatiquement

On imagine souvent le calcul ainsi :

« J’ai déjà 20 % d’IPP, on me donne 15 % pour une nouvelle pathologie, donc je deviens à 35 %. »

Dans la pratique, ce n’est pas du tout comme ça que ça fonctionne.

Sur le plan médical : un taux global, pas une addition simple

Le taux d’IPP est censé refléter un état global de la personne à un moment donné. Lorsque survient une nouvelle pathologie, l’évaluation médicale consiste à :

  • réexaminer l’ensemble des séquelles,
  • apprécier la situation globale,
  • fixer un nouveau taux, qui peut être plus élevé, mais qui n’est pas une somme arithmétique des anciens taux.

Ce que le médecin expert ne fait pas :

20 % (ancien) + 15 % (nouveau) = 35 %

Il regarde :

“Compte tenu de l’ensemble des séquelles anciennes + nouvelles, quel est le taux d’incapacité globale ?”

Ce taux peut être :

  • identique (si la nouvelle pathologie est jugée sans incidence notable),
  • un peu plus élevé,
  • nettement plus élevé dans les cas graves.

Sur le plan juridique : révision plutôt que cumul

Selon la situation, on est généralement dans l’un des scénarios suivants :

Même accident / même maladie professionnelle :
→ la nouvelle atteinte donne lieu à une révision du taux. Le nouveau taux remplace l’ancien.

Nouvelle maladie professionnelle ou nouvel accident du travail :
→ chaque sinistre peut avoir son taux propre et, le cas échéant, sa rente spécifique.
→ On peut parler de cumul des rentes, mais pas d’un taux médical unique additionné.

Pathologie hors AT/MP (maladie « classique ») :
→ pas d’IPP AT/MP attribué pour cette pathologie, même si elle aggrave votre situation globale.
→ le cumul n’a donc pas de sens dans ce cadre.

On peut cumuler des droits, mais on ne cumule pas des pourcentages comme des chiffres sur une calculatrice.

Ce que regardent les assureurs : le barème croisé fonctionnel / professionnel

Les assureurs ne regardent pas le taux d’invalidité de la Sécurité sociale. Ils recourent à une expertise indépendante et à un barème croisé.

L’expertise médicale de l’assureur

En pratique : L’assureur mandate un médecin expert (tiers, c’est-à-dire ni le médecin traitant ni le médecin CPAM).

Ce médecin réalise un examen clinique, interroge l’assuré, examine les pièces médicales. Il évalue : un taux fonctionnel : perte de capacités physiques, sensorielles, psychiques… et un taux professionnel : capacité à exercer sa profession, à être reclassé, à travailler sur un autre poste, etc. Ces deux dimensions sont ensuite combinées.

Le barème croisé des conditions générales

Le taux d’invalidité retenu par l’assurance est calculé à partir :

  • du taux fonctionnel,
  • du taux professionnel,
  • d’un barème croisé prévu dans les Conditions Générales (CG).

Ce barème peut par exemple prévoir qu’une incapacité fonctionnelle importante mais avec maintien possible dans un autre emploi n’est pas équivalente à une incapacité totale d’exercer toute profession.

👉 Vous avez donc trois “niveaux” d’appréciation différents :

  • la CPAM (invalidité / IPP AT-MP),
  • le médecin expert de l’assureur,
  • le barème contractuel qui traduit ça en un taux d’invalidité propre au contrat.

Le seuil des 66 % pour la garantie IPT

Dans l’immense majorité des contrats d’assurance emprunteur :la garantie IPT (Invalidité Permanente Totale) n’est due que si le taux contractuel d’invalidité atteint au moins 66 %. Ce taux de 66 % est calculé par l’assurance, à partir du barème croisé, et non à partir du taux d’invalidité CPAM ou du taux d’IPP AT/MP.

C’est ce qui explique des situations très frustrantes pour les assurés :

  • invalidité CPAM catégorie 2 → 66 % ou plus pour la Sécurité sociale,
  • mais 22 % seulement pour l’assurance emprunteur,
  • donc refus de prise en charge.

Nouvelle pathologie : pas de cumul automatique, mais une possible augmentation des taux

Une question centrale pour les assurés est la suivante :

« Si une nouvelle pathologie apparaît, est-ce que mon taux va augmenter ? »

La réponse est nuancée : Elle ne va pas forcément s’additionner, mais elle peut tout à fait faire augmenter les deux taux, fonctionnel et professionnel, et donc le taux final retenu par l’assurance.

La nécessité d’une nouvelle expertise

Pour que cette nouvelle pathologie soit prise en compte, il ne suffit pas de transmettre un nouveau compte-rendu médical. En pratique : l’assureur va généralement exiger une nouvelle expertise médicale, son médecin expert va réévaluer : votre état fonctionnel global, votre capacité à travailler (dans votre métier ou un autre).

La nouvelle pathologie peut : modifier le taux fonctionnel (par exemple : apparition de douleurs invalidantes, perte de mobilité supplémentaire, trouble psychiatrique associé, etc.), et/ou modifier le taux professionnel (par exemple : impossibilité d’exercer le métier, difficulté de reclassement, fatigabilité majeure).

En combinant ces deux dimensions, le taux d’invalidité contractuel peut alors augmenter.

4.2. Quand la nouvelle pathologie peut changer la donne

Quelques exemples typiques : Vous aviez déjà des douleurs lombaires chroniques, puis apparaît une dépression réactionnelle sévère, liée à la douleur, à la perte d’emploi, à la précarité, etc.

→ L’impact sur votre capacité à reprendre un travail peut devenir beaucoup plus important.

Autre cas :

  • Vous avez une maladie professionnelle non consolidée,
  • vous êtes en invalidité CPAM,
  • à la consolidation, un taux d’IPP AT/MP est fixé,
  • ce taux ne s’ajoute pas mécaniquement au taux déjà retenu par l’assurance, mais il constitue un élément nouveau et fort que l’assureur doit intégrer dans son évaluation (nouvelle expertise, nouveau calcul au barème croisé).

Contester la décision de l’assureur : expertise contradictoire et tierce expertise

Lorsque l’assuré reçoit un courrier indiquant :

« Votre taux d’invalidité est évalué à 22 %, la garantie IPT ne peut être mise en œuvre. »

… alors même qu’il se sent incapable de travailler, la frustration est immense. Heureusement, il existe des voies de contestation, mais elles sont souvent longues et techniques.

Demander une expertise contradictoire

Première étape : contester la décision de l’assureur, en demandant une expertise contradictoire.

  1. Vous saisissez l’assureur par écrit, en expliquant pourquoi vous contestez le taux retenu.
  2. Votre médecin traitant ou votre spécialiste peut prendre contact directement avec le médecin expert de l’assureur.
  3. Si les deux médecins parviennent à un accord :
    – l’expert rédige un nouveau rapport,
    – ce rapport est transmis à la compagnie,
    – le taux d’invalidité peut alors être revu à la hausse.

Cette phase contradictoire est déjà une deuxième chance de faire reconnaître la réalité de votre incapacité.

En cas de désaccord : la tierce expertise

Si votre médecin et l’expert de l’assureur restent en désaccord, il reste un dernier recours amiable : la tierce expertise.

Elle met en présence :

  • l’expert initial (celui mandaté par la compagnie),
  • votre médecin (ou un médecin mandaté pour vous défendre),
  • un troisième médecin “neutre”, choisi d’un commun accord ou désigné selon la clause du contrat.

Ce troisième expert joue le rôle d’arbitre médical. Le rapport de tierce expertise a souvent une valeur déterminante aux yeux de la compagnie… et, le cas échéant, du juge.

Une procédure longue… mais parfois incontournable

Il faut être transparent ; cette procédure peut être :

  • très longue : souvent au minimum 6 mois, parfois jusqu’à 2 ans,
  • éprouvante sur le plan humain, médical et financier,
  • difficile à gérer seul, sans accompagnement spécialisé.

C’est précisément dans ce type de situation qu’un accompagnement par des professionnels du droit des assurances et de la protection sociale peut faire une différence concrète :

  • sécuriser les démarches,
  • analyser le contrat et les barèmes,
  • préparer les expertises,
  • identifier les failles dans le raisonnement de l’assureur,
  • défendre vos intérêts jusqu’au bout.

Le rôle d’un accompagnement spécialisé

Face à la complexité : des textes, des barèmes, des expertises médicales, et des procédures d’assurance, beaucoup d’assurés ont le sentiment d’être dépossédés de leur propre dossier. Un accompagnement comme celui proposé par l’ADPPC peut intervenir à plusieurs niveaux :

  • Analyse de votre situation globale : IPP AT/MP, invalidité CPAM, contrats d’assurance emprunteur, prévoyance, etc.
  • Lecture détaillée des Conditions Générales : barème croisé, seuils de déclenchement, définition de l’IPT, clauses d’expertise.
  • Préparation aux expertises médicales : quels documents fournir, quoi expliquer, comment décrire l’impact réel sur votre vie quotidienne et professionnelle.
  • Assistance dans les recours : expertise contradictoire, tierce expertise, réclamation écrite, éventuellement contentieux.

L’objectif n’est pas seulement de “comprendre” vos droits, mais de les faire respecter.


Les questions les plus fréquentes sur le cumul des taux d’IPP

Peut-on cumuler plusieurs taux d’IPP ?

Pas au sens d’une addition automatique. On peut cumuler plusieurs droits (rente AT/MP, invalidité, garantie emprunteur), mais le taux d’IPP lui-même est une appréciation globale de votre état, qui est révisée, pas additionnée.

Si j’ai 20 % d’IPP et qu’on me donne 15 % pour une nouvelle pathologie, est-ce que ça fait 35 % ?

Non. Le médecin va réévaluer votre situation globale et fixer un nouveau taux, qui peut être : 20%, 25%, 30%, 35%, … mais ce n’est pas une addition mécanique 20 + 15…

Les assureurs doivent-ils suivre le taux d’invalidité de la Sécurité sociale ?

Non. Ils peuvent s’y intéresser, mais ils ne sont pas liés par ce taux. Ils appliquent leur propre barème et se fondent sur une expertise médicale spécifique.

Une nouvelle pathologie peut-elle faire augmenter mon taux d’invalidité pour l’assurance emprunteur ?

Oui, tout à fait. Même si les taux ne “s’additionnent” pas, une nouvelle pathologie peut faire augmenter : votre taux fonctionnel, votre taux professionnel, et donc le taux contractuel final, qui peut atteindre ou dépasser le seuil de 66 % nécessaire pour l’IPT.

Que faire si je ne suis pas d’accord avec le taux fixé par l’assureur ?

Vous pouvez : Demander une expertise contradictoire, avec l’intervention de votre médecin. En cas de désaccord persistant, demander une tierce expertise (expert de l’assureur, votre médecin, troisième médecin neutre). Vous faire accompagner par un professionnel (avocat, courtier, expert) pour sécuriser et défendre vos droits.

Les taux d’IPP et d’invalidité ne se cumulent pas comme de simples chiffres. Chaque acteur – Sécurité sociale, CPAM, assurance emprunteur – applique sa propre logique, ses barèmes, ses expertises.

En revanche, une nouvelle pathologie ou une évolution de votre état peut :

  • justifier une révision des taux,
  • conduire à une augmentation du taux global,
  • ouvrir de nouveaux droits, notamment auprès de l’assurance emprunteur.

Face à ces enjeux financiers majeurs (crédit immobilier, perte de revenus, avenir professionnel), il est souvent décisif de ne pas rester seul avec ses questions.

💬 Vous êtes en invalidité, en AT/MP, et votre assureur refuse d’indemniser ? Vous ne comprenez pas le taux qui vous a été attribué ? Contactez ADPPC pour une analyse personnalisée de votre situation et de vos droits.

Les taux d’IPP ne se cumulent pas automatiquement

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